carignan99, le 28/10/2020 a écrit :
Je ne cesse de m’étonner que la tonalité de la communication gouvernementale (et médiatique?) insiste sur qui va mourir, ou combien vont mourir.
Mais plus rares sont les annonces qui explicitent les actions concrètes sur la problématique suivante : beaucoup de gens vont tomber malades mais ne vous inquiétez pas, avec les gestes barrières + les mesures en place, tout est en place pour qu’on puisse soigner ces gens sans avoir à paralyser à nouveau la vie économique du pays.
Qu’en mars le gouvernement et le système hospitalier se soient retrouvés à la ramasse, ok. Mais 6 mois plus tard, je pensais que nos dirigeants et hauts fonctionnaires divers et variés avaient fait leur job, à savoir :
- Lancé un grand plan de recrutement / formation d’aides-soignants, infirmiers/ières et autres personnels hospitaliers - avec un système de soins doté pour répondre à une urgence telle que celle qu’on voit aujourd’hui (et qu’on verra demain).
- Construit (ou prévu) des infrastructures provisoires, déployables à la demande, pour traiter les cas hors réa (ceux qui en ce moment, commencent à paralyser mon hosto de province) et ainsi éviter d’engorger l’hôpital.
- Prévu 12000 postes de réa, qu’on peut faire monter en puissance à la demande.
- Mis en place un système fluide et efficace pour articuler privé et public
(et autres actions utiles, dont j’ignore la teneur).
Si tout ça a été fait, pourquoi faudrait-il re-confiner?
Je viens de lire dans le Figaro le Dr Bruno Lina qui déclare, aujourd’hui (source) qu’il faudrait probablement, à terme, "avoir recours à une coopération entre les secteurs public et privé pour être en mesure d’absorber la demande".
Cette déclaration est effarante - naïvement, je pensais que c’était déjà fait…
En fait, ce dont vous parlez, c’est qu’il faudrait revenir en arrière sur des années de déconstruction d’une structure de fonctionnement du système de santé.
Depuis 20 ans je n’ai vu que perdre de la fluidité, je n’ai jamais vu progresser le cloisonnement entre différents services, entre le public et le privé.
Par contre j’ai vu progresser l’empilement de couches de hiérarchie, enfler le temps passer à remplir de la paperasse pour que les cadres des service justifient que la boutique tourne, et selon les directives imposées…bref on a augmenté l’activité de contrôle sur le système lui-même, en poussant le bouchon jusqu’à faire que ce soient les éxécutants qui fassent le job de contrôle eux-mêmes, pendant que les n+n+n+…restent en réunion à gloser sur ce qu’il faudrait faire, ne pas faire, tout en n’écoutant pas, ou peu, ou plutôt jamais, et surtout en faisant semblant d’écouter ceux qui sont tout en bas, là où ça crise, là où ça glisse dans les flaques de pisse, là où ça sent la merde, le sang et le vomi…Excusez la crudité du truc, mais bon, je sors du taf, un peu blasé. Oui, je suis infirmier, et on patine dans la semoule. Trois arrèts maladies en cours mini sur la petite structure où je suis en ce moment. Ce qui n’était pas autant au printemps. Sans compter les confinés because la fille est diagnostiquée positive, alors qu’elle n’a aucun symptôme, que personne chez elle n’a aucun symptome.
Par contre il y a deux semaines quand j’ai été chercher les vaccins pour la grippe, le mardi la pharma a été dévalisée à leur arrivée. Résultat, rien pour vacciner le personnel, ils sont considérés comme non prioritaires. Et on disait que la prochaine livraison ne serait pas avant début Novembre.
J’ai alors appris que leurs commandes de vaccins étaient faites en Décembre tous les ans.
Au vu du tableau on aurait pu penser qu’une augmentation des stockes aurait pu être planifiée, pensée, par nos gouvernants, genre un peu de prévoyance, depuis ce printemps.
Mais en fait non.
Donc je crois qu’on nous raconte beaucoup de trucs qui donnent à penser et font flipper les gens, mais qu’en fait pour gérer le fond de la boutique, c’est ceux qui marnent sur le terrain qui tiennent les murs, depuis le début, et que tous les ronds de cuir qui nous parlent de ce qu’ils ne connaissent que sur le papier, et bien, ils le gèrent fort peu voire mal. Voire de façon désastreusement merdique.
Car donner la souveraineté aux soignants sur ce qu’ils savent faire, serait un acte politiquement trop subversif, et impossible à penser pour des gens qui ne pensent qu’en terme de contrôle.
Le masque en est un exemple typique et symbolique: son seul avantage, c’est de permettre de voir qui participe ou pas au truc.
Alors qu’on ferait mieux de rappeler aux gens de se laver et relaver les mains, et de ne pas oublier d’avoir les moyens de le faire, ce qui n’est pas gagné.µ
Bref, je ne me fais pas d’illusions depuis longtemps, mais quand un collègue de Raoult disait, face à l’empèchement d’avoir de la Chloroquine, qu’il avait bossé dans des pays en voie de développement, et que ce ne serait pas la première fois qu’il serait confronté à telle situation, on devrait se poser la question de ce que signifie être comparé à un pays en voie de développement.
Sauf qu’on est un pays non pas développé, mais en sous-développement, quand on régresse.
Voilà. Excusez mon désabusement.
Mais je n’ai rien qui me fasse changer d’avis.